mercredi 20 février 2013

Les ongles

Moi, je n'ai jamais eu d'ongles. Ben, c'est-à-dire: j'ai toujours eu des ongles, bien sûr, j'ai pas une rare mais bénigne tare génétique qui m'aurait fait naître sans ces curieux appendices, d'une incapacité hyper-localisée à secréter de la kératine, je ne souffre pas d'aungéalei (muf), d'hypertrophie ongulaire, rien de ça. Mais, bon, j'ai jamais eu des beaux ongles, ces beaux ongles longs, durs, polis au dessus, propres en dessous, dont la partie détachée du lit est immaculée, parfaitement ronde ou droite selon le type de manucure choisi.
La première raison pour laquelle je suis spoliée de l'inoffensive vanité de la belle main est le fait que d'aussitôt que je me souvienne, je me les suis rongés. Stress, nervosité, je suis une angoissée, on le sait. C'est pas de ça qu'on parle, là. Non, je me suis grignoté l'ongle et ses entremets, soit les cuticules ainsi que les exquis paronychium, névrophagie délicate qu'il m'est difficile de délaisser, durant la majeure partie de ma vie. Mais, l'an passé, j'ai décidé d'arrêter. Oué. Comme ça, nette frette sec. J'avais essayé avant, mais il me manquait un précieux adjuvant: le vernis amer de la marque écrinal. Le descriptif résume assez follement bien sa fonction: tu te le mets, ça colle, et ça goûte la tristesse dissuasive quand t'essaies de t'adonner à ta petite compensation régressive.
Mes ongles ont finalement poussés. Joie!
Pour les mois qui suivirent, j'appris tant bien que mal, avec des années de retard sur mes congénères, les rudiments des soins dû aux ongles. Pour ce faire, je me suis procuré une petite panoplie d'outils: une lime à ongle en verre, une lime à ongle à 4 surfaces d'émeris différents, un cure-ongle, un PLÉTHORE de vernis aux teintes, brillances, et fonction différentes, une petite pommade post-vernis, des cotons-tiges, des cotons-ouates, des cotons-éponges, du dissolvant. J'ai consulté des blogs. J'ai recommencé des manucures 4 ou 5 fois.
Bref, je me suis pas mal investie pour combler cette lacune féminine. Oui, ma soeur, je me suis donnée. J'ai même fait des trucs fancy, comme des effets "ombrés", des rayures, des motifs...
Ben, rien à faire!
Ces cons d'ongles, ils cassent. Ils poussent en patte de canard (en ce sens que tel le pied dudit palmidé, la base est moins large que le bord. Eurk.) Et ils se retrouvent à l'occasion encore sous ma dent.
Et je me demande, est-ce que ça vaut la peine de se commettre autant pour un détail somme toute assez mineur et facultatif de mon apparence? C'est pas comme si j'avais une image publique à entretenir. Et, ouais, c'est agréable d'avoir autant de torque quand je me gratte, (quoique au début j'étais tellement pas habituée d'être ongulée que je m'égratignais la face. Changement de paradigme pis toute.) Somme toute, à quoi bon?

Hé bien, je souhaite ardemment avoir une belle main. Une belle main bien soignée, c'est un plaisir narcissique, mais qui a ceci de particulier qu'il est avant tout destiné à soi-même. Ce que je veux dire, c'est qu'on est bien plus susceptible de se mater la main qu'autrui. C'est une partie de notre corps non seulement essentielle, mais aussi particulièrement expressive, et étrangement libérée de pression archétypale. Les gens jugent et catégorisent pas mal moins l'aspect de la main que celui du visage, des cheveux, de la taille, de l'habillement. Mais plus encore que cet aspect de la liberté de la main, elle nous est... proche. Et en même temps, elle a quelque chose d'objectif, de légèrement détachée de nous-même. 
Bref, notre main est à nous et elle nous le rend bien (on aura compris que ma réflexion mériterait d'être encore un peu travaillée). Quand on la décore, c'est avant tout pour le plaisir légèrement isolé de ses propres yeux. Ces minuscules parures peuvent voltiger devant le regard d'autrui, et ce sera comme un message secret, qu'il aura fallu vouloir saisir.

Donc je vais continuer à me désoler sur mes ongles cassés, n'en déplaisent aux gens qui n'apprécient guère ces subtilités.

samedi 2 février 2013

J'ai rêvé de F

J'ai rêvé de toi
Tu étais comme
Avant, quand j'étais
folle; beau, à l'époque
tu me faisais rêver.

Maintenant
tu es gros
Tes yeux sont
des coques
échouées.

Et je suis
moins
folle.