mardi 11 septembre 2012

C'est une course

Au tout début, il y a eu le soleil, et le vent.
À petits coups saccadés et haletants, d'une secousse brusque mais quand même insuffisante, les pieds se sont appuyés sur les pédales. Un rythme au pas, ponctué du souffle court de la cycliste molle.
On entendait le gravier crisser sous les pneus, et le vent dans les oreilles, et la respiration faisait mal, mais il fallait garder la vitesse, la lenteur était insupportable.

Après un moment, deux tours de la carrière Miron, il a fait soif. La bouteille avait été oubliée, distraitement. Il fallait subir la salive épaisse, visqueuse, salée, dans une cavité orale sèche. Caries oubliées, troglodytes mises à nu... Zones de chaleur sur l'épiderme et une soif intense, péremptoire;
Dans l'espèce d'immense temple, on pourrait croire qu'on s'est fait assommé par la chaleur, le manque d'eau, la fatigue des membres et du coeur. Mais il y a aussi tous les fidèles dans l'immense temple, toutes les reliques.
«Hein? Ils vendent du linge dans les Maxi?"
Un bourdonnement. Comme un automate, j'en prend, je me ressers, et on repart, alourdi.

À la maison, il y a eu deux, trois, quatre bières? D'abord, elles sont fraîches, avec quelque chose de nourissant. La langue sape le liquide qui est tour à tour froid, moussu, lisse, odoriférant, rassasiant.
Et puis ça devient frénétique. Par delà le plaisir du corps. C'est encore une course. J'en prend une, je la finis, je m'en reprends.

S'y joignant, ce sont, enfin, les émanations poivrées des herbes. Je suppose qu'elles finissent gagnantes, parce que tout est retombé, les clameurs ont retenti, le drapeau s'es abaissé, il y a eu désignation du vainqueur, je n'ai pas les noms, il n'y a plus personne, juste moi et ma stase.

La faim est toujours là qui tenaille. C'est une course, je vous ai dit. J'ai mastiqué et avalé  et m'en suis resservi et je reboirais et je refumerais parce que mon ventre était avide, je suis toujours avide, jusqu'à ce qu'on s'arrête.

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